C’est avec beaucoup de détermination que j’ai voté en faveur de la proposition de loi de mon collègue député socialiste Philippe Brun, qui vise à empêcher le démembrement d’EDF et notamment à interdire la vente des activités les plus rentables d’EDF au secteur privé. C’est un hémicycle unanime qui a adopté, après de nombreuses lectures devant le Parlement, ce texte qui revêt une importance considérable, tant notre souveraineté énergétique est au centre de tous les débats.
Reprendre la main sur notre politique énergétique
La flambée des prix de l’énergie résultant de la reprise économique post Covid et de la guerre en Ukraine, a souligné les défaillances du marché de l’énergie européen. Légitimement, ce contexte a remis sur la table la question de la maîtrise de notre politique énergétique, et des moyens à mettre en œuvre pour garantir notre indépendance.
Or, l’avenir de notre politique énergétique est indissociablement lié à celui d’EDF. D’ailleurs, l’entreprise fournit toujours, via le nucléaire, près de 70% de notre mix énergétique. Mais l’entreprise fait face à un manque d’investissements chronique, à des difficultés financières, et à un défaut de perspective sur son avenir et celui de notre mix énergétique.
C’est dans ce contexte dégradé qu’intervient cette proposition de loi. Tout le monde s’accorde à le dire, le besoin de protection du groupe EDF est une grande urgence. Rappelons en effet la volonté, que traduisait le projet Hercule imaginé par le Gouvernement, de procéder à une vente à la découpe, en cédant – comme d’habitude –les activités les plus rentables du groupe EDF, tout en gardant celles qui ne le sont pas dans le giron public. Nous nous sommes opposés à de nombreuses reprises à ce projet de « ventes à la découpe » de notre plus beau fleuron national et nous sommes convaincus qu’il faut à tout prix éviter qu’un projet du même ordre puisse un jour aboutir ; protéger le groupe d’un démembrement est donc l’un des objectifs de cette proposition de loi.
EDF doit rester dans le giron de l’Etat
Le 8 juin dernier, le Gouvernement a repris 100% du capital du groupe EDF. Symbolique, cette « renationalisation » totale de l’entreprise est aussi censée dégager des marges de manœuvre financières de long terme pour le groupe surendetté. Mais elle ne résoudra pas tous ses problèmes.
Malgré ces 100 % détenus par l’Etat, le groupe garde le régime d’une société anonyme. En conséquence, l’Etat aura toujours la possibilité – et sans l’opposition d’actionnaires minoritaires désormais – de le déstructurer.
Aussi, nous étions favorables à la rédaction proposée par les rapporteurs successifs à l’Assemblée nationale : lister les activités du groupe EDF dans la loi pour maintenir l’unité du groupe, sans l’empêcher de développer d’autres activités par ailleurs, ni s’internationaliser. Plutôt que cette rédaction sécurisante pour l’avenir, les sénateurs ont préféré la mise en place d’une convention décennale entre l’Etat et EDF, qui ne relève pas à notre sens du niveau législatif.
Toutefois, l’inscription dans la loi d’une détention à 100% du capital d’EDF par l’Etat, impose de repasser devant le Parlement pour tout projet de démantèlement, et présente en ce sens une garantie contre le retour d’un nouveau projet Hercule. Ainsi, toute évolution de la structure du groupe ou de ses activités devra obligatoirement passer par la loi et donc le Parlement.
Un bouclier étendu à l’ensemble des PME
La récente crise de l’énergie a apporté la preuve de la nécessité d’un dispositif plus protecteur. Dans un contexte géopolitique tourmenté, la France n’est pas à l’abri d’un nouveau choc lié aux énergies fossiles. Il faut prémunir nos artisans, commerçants et agriculteurs contre ce risque.
C’est tout le sens du deuxième volet de cette loi, protéger nos très petites entreprises contre les violents soubresauts des marchés de l’énergie, en étendant à leur profit les tarifs réglementés de vente de l’électricité, sans condition de puissance souscrite.
Ce sont au total, plus de 2 millions d’entreprises qui seront protégées de l’explosion des prix de l’électricité : boulangers, pressings, éleveurs laitiers, restaurateurs. Il y avait urgence à agir : 1100 boulangeries ont fait faillite l’an dernier en raison de l’augmentation irrationnelle des prix de l’énergie.
Nous aurions souhaité également appliquer le bouclier tarifaire à l’ensemble des collectivités. Car elles sont nombreuses aujourd’hui, quelques soient leur taille, à devoir de limiter l’accès à certaines de leurs équipements : piscines, musées… en raison de l’explosion de leurs factures énergétique. Nous ne pouvons pas nous résoudre à cette dégradation de la qualité du service public et regrettons que le Sénat ait ciblé son dispositif exclusivement sur les plus petites collectivités.
Au final, même s’il nous faudra encore batailler pour obtenir la création d’un véritable pôle public de l’énergie, il n’en reste pas moins qu’il s’agit là d’une belle victoire pour EDF, pour nos artisans mais aussi pour les petites communes. Il est clair que nous ne pourrons faire face au défi immense de la transition écologique, ni assumer nos ambitions énergétiques, sans un groupe EDF fort et unifié, au service de la puissance publique et de nos concitoyens.